On a beau nommer ces rorquals « commun », ils possèdent des caractéristiques hors du commun, comme Bergeronnes!
Avant la découverte de sa carcasse, Bergeronnes n’était pas connu des chercheurs. Il avait peut-être déjà visité le Saint-Laurent, mais n'avait pas été identifié. Avec ses 16 m de long, ce rorqual commun avait la taille d'un jeune d'environ 1 ou 2 ans.
Voici 3 rorquals communs connus dans l'estuaire du Saint-Laurent (Caïman, Zipper et Piton). Pouvez-vous noter des différences entre ces individus? Regardez la forme de la nageoire dorsale, la présence de cicatrices…
Crédits: GREMM
Caïman
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Zipper
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Piton
Il n’est pas si facile d’identifier ce type de baleine. Pour y arriver, on regarde la forme de la nageoire et les cicatrices, mais on cherche aussi à photographier le chevron. Ce motif de coloration plus clair présent derrière l’évent est comme une empreinte digitale: il est unique pour chaque individu.
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Sur le dos des deux rorquals communs en avant-plan, on peut voir des marques de coloration plus claires. C’est ce qu’on appelle le chevron. Ce motif est surtout apparent du côté droit. Arrivez-vous à noter des différences entre le motif de ces deux individus?
Le 17 septembre 2008, un rorqual commun est trouvé mort, dérivant au large de Tadoussac. Est-ce une coïncidence si, un mois plus tôt, une marée rouge frappait le Saint-Laurent?
Tout porte à croire que la baleine aurait été intoxiquée par cette floraison d’algues toxiques de couleur rouge. En effet, des traces de la toxine ont été retrouvées dans le foie de Bergeronnes. Ce dernier a pu être examiné, car la carcasse avait été remorquée jusqu’à la rive des Bergeronnes afin d’être étudiée et récupérée pour conserver son squelette.
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La carcasse de Bergeronnes dérive au large de Tadoussac. Les gaz de putréfaction font gonfler son ventre et la font flotter.
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Bergeronnes tient son nom du village où sa carcasse a été sortie de l’eau.
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La carcasse de Bergeronnes a été transportée dans un champ afin d’être dépecée pour en conserver le squelette. Cela a demandé le travail de plusieurs bénévoles afin de retirer toutes les chairs des os.
Bergeronnes, comme tous les rorquals communs, avait une coloration asymétrique. Il s'agit de quelque chose d'assez unique dans le règne animal! Ils possèdent un côté clair et un côté sombre…
Le côté droit est toujours le plus clair: les fanons sont pâles, la mâchoire est blanche et le chevron est plus apparent. À l'inverse, le côté gauche est plus sombre: les fanons sont foncés et la mâchoire est grise. Une théorie veut que le contraste des couleurs pourrait l'aider à se camoufler de ses proies lorsqu'il s'élance sur le côté pour les attraper... Mais, on n'a jamais pu le prouver.
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La démarcation entre le côté clair et le côté sombre est assez nette sous la mâchoire.
Bergeronnes était dans un bon état de chair quand on a retrouvé sa carcasse, on sait donc qu'il a réussi à bien se nourrir... S'est-il surtout nourri en solitaire ou s'est-il déjà associé à d'autres rorquals communs?
Ces baleines s'associent parfois à d'autres individus pour améliorer leurs chances de faire une chasse fructueuse. Elles nagent alors de manière coordonnée en décrivant des cercles afin de rassembler leurs proies. Mais ces associations sont temporaires et ne présentent pas d'interactions sociales complexes, comme on pourrait le voir chez les dauphins ou les bélugas. Un rorqual commun peut aussi souvent être vu en solitaire.
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Au large de Tadoussac dans l'Estuaire du Saint-Laurent, il n'est pas rare de voir les rorquals commun se regrouper comme on peut le voir sur cette photo, mais on les voit aussi très souvent seuls.
On surnomme les rorquals communs les lévriers des mers, car ils peuvent atteindre des vitesses de pointe de 40 km/h dans l’eau.
Toutefois, si Bergeronnes aurait probablement un 100% en athlétisme pour sont excellence dans la discipline de la vitesse, il aurait eu une mauvaise note en gymnastique. Les rorquals communs ne sont en général pas les plus grands acrobates puisqu'il est très rare de les voir sauter hors de l'eau.
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Avec sa peau lisse et son profil hydrodynamique, une baleine comme Bergeronnes se déplace facilement dans l'eau. Elle se propulse par de puissants mouvements de la queue, aussi efficaces à la montée qu'à la descente.
Ses nageoires pectorales ne lui servent pas à se propulser comme nous pouvons le faire avec nos bras, mais lui servent surtout à manœuvrer sous l’eau. Ces nageoires l’aident aussi à se stabiliser, tout comme la nageoire dorsale qui agit comme l'aileron d'un bateau, lui permettant de ne pas rouler sur le côté.
À quelle vitesse nage une baleine?
La vitesse de nage varie d'une espèce à l'autre, les bélugas étant plutôt lents si on les compare aux dauphins ou aux rorquals communs. Il y a aussi une différence entre la vitesse de déplacement habituelle pour une espèce (illustrée par la bande bleue) et sa vitesse maximale (illustrée par la bande rouge). De la même façon, nous ne courons pas à la même vitesse que nous marchons!
À quelle profondeur plonge une baleine?
Les baleines ne plongent pas toutes à la même profondeur. En général, elles plongent là où elles vont trouver leur nourriture. Ainsi, une plongée moyenne pour un rorqual commun se trouve entre 100 et 200 m de profondeur, mais si elle peut trouver sa nourriture en surface, elle n'ira pas plus loin. Dans le même ordre d'idée, les principales proies du cachalot se trouvent généralement entre 500 et 800 m de profondeur, mais si nécessaire, le cachalot serait capable de descendre jusqu'à 2000 m pour trouver son repas.
Comment font les baleines pour résister à la pression des profondeurs?
Grâce à du cartilage qui va protéger la partie supérieure des poumons et à l'absence de cavités d'air comme les sinus faciaux et les oreilles externes.
Plus on s’enfonce dans les profondeurs, plus la pression devient importante. Les cavités d’air comme les poumons courent donc le risque de se retrouver écrasées sous la pression. Les baleines remédient à ce problème grâce à du cartilage qui vient renforcer la partie supérieure de leurs poumons. Ainsi, la partie inférieure du poumon s'affaisse, mais la partie supérieure conserve sa forme, aidant la baleine dans sa remontée. Aussi, chez un humain et les autres mammifères terrestres, les sinus de notre nez et les cavités d'air dans nos oreilles pourraient être un problème… Mais les baleines n'ont pas de sinus faciaux et n'ont pas d'oreilles externes, alors problème réglé!
Est-ce qu'une baleine peut avoir un accident de plongée?
En général, une baleine sait bien gérer sa remontée pour éviter ce problème. Mais, exposée à un stress, il pourrait lui arriver de remonter trop rapidement. Les baleines peuvent donc aussi avoir des accidents de décompression.
Ceux-ci sont bien connus chez les humains qui font de la plongée. Les microbulles d'azote dissoutes dans le sang et les tissus grossissent si le plongeur remonte trop rapidement, et le gaz ne peut pas être expiré par les poumons. Cela peut créer des lésions, qui peuvent entrainer de la douleur articulaire, de la paralysie, et même la mort.
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Un rorqual commun remonte à la surface pour respirer.
Les baleines ont la capacité d'entendre un navire approcher. Mais lorsqu'elles nagent dans une zone où il y a beaucoup de passages de bateaux, elles pourraient finir par s'habituer au bruit et ne plus y porter attention.
Ainsi, dans un couloir de naviguation comme le Saint-Laurent où il y a beaucoup de passages de bateaux, les risques de collisions sont plus grands. Puis, les bateaux ne possèdent pas de sonars qui permettent de détecter les baleines.
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Pour un gros navire et son équipage, une collision avec une baleine passera généralement inaperçue. Pour l'animal, toutefois, la collision peut causer des blessures ou même entrainer la mort.
Il n'a pas été possible d'écarter la cause d'une collision dans la mort de Bergeronnes. Il semblait porter des signes d'hémorragie sur son dos, mais la signification de cette blessure reste incertaine. On a trouvé des os fracturés, mais comme ils n'étaient pas associés à l'hémorragie, on pense plutôt que cela aurait pu se produire après la mort de l'animal. C'est souvent difficile à dire…
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Il est possible que les os de Bergeronnes se soient fracturés lors du transport. Même si les risques de collision avec les navires sont une menace connue pour ces baleines, il faut toujours faire attention de ne pas sauter trop vite aux conclusions.
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Ce rorqual commun est une femelle connue sous le nom de Zipper. Lorsqu’elle a été reconnue pour la première en 1994, elle portait alors des blessures fraiches. Sa peau en lambeaux montrait les marques d’une collision avec une hélice de bateau. Heureusement pour Zipper, elle a survécu à ses blessures et est encore une visiteuse régulière du Saint-Laurent.
Les rorquals communs de la population Atlantique comme Bergeronnes ont le statut d'espèce «préoccupante». Elles sont principalement menacées par les enjeux liés au trafic maritime, incluant les collisions avec les navires.
Une baleine a beau être un géant, elle ne fait pas le poids contre un gros navire. Un rorqual commun fait la taille d’environ 1 à 2 conteneurs alors que ce type de bateau en transporte des milliers.
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Que faire pour réduire les collisions ?
Le simple fait de ralentir permet de réduire les risques.
Un bateau qui va plus lentement a plus de chances de repérer une baleine à temps ou de laisser une chance à celle-ci de s'éloigner. À vitesse réduite, le risque qu'une collision soit mortelle est aussi grandement diminué.
Crédits: Transports Canada, Gouvernement du Canada
Carte des mesures de restriction de vitesse dans le golfe du Saint-Laurent en 2020. Dans les zones statiques en rose, tous les navires d'une longueur supérieure à 13 m doivent respecter une limite de vitesse de 10 nœuds. Dans le couloir dynamique en vert, la restriction de vitesse s’applique uniquement lorsqu’il y a détection d’une baleine noire de l’Atlantique Nord, une espèce tout particulièrement vulnérable aux collisions.
Que faire pour réduire les collisions ?
Rester à l'affut et adapter sa navigation à la présence de baleines.
En ayant des observateurs qualifiés à bord des navires, on augmente les chances de repérer les baleines à temps. Puis, lorsqu'on connait bien les zones où les baleines se trouvent le plus souvent, on peut éviter certaines zones afin de réduire les risques de rencontre.
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Les gens à bord du navire ont-ils repéré le rorqual à bosse devant?
Comment faire sa part pour aider à réduire les collisions ?
Favoriser l’achat de produits locaux et réduire sa consommation permet de limiter l'augmentation du trafic maritime puisqu'une grande partie de ce que nous consommons, comme des fruits, des vêtements ou des appareils électroniques, arrive par voie maritime.
Maintenant que vous avez découvert l'histoire de Bergeronnes, partez à la rencontre des autres baleines!
Rorqual commun
Balaenoptera physalus
Caractéristiques
Rorquals communs de l'est du Canada
Poids
40 à 50 tonnes
Taille
18 à 20 m, jusqu'à 25 m
Longevité
80 à 100 ans
Population
environ 7400 individus
Statut
Préoccupant
Bergeronnes
Poids
inconnu
Taille
16,24 m
Naissance - Décès
possiblement entre 2006 et 2007 - Septembre 2008
Numéro d’identification
non connu des chercheurs
Sexe
Mâle
Après plus de dix ans dans un champ, les os de Bergeronnes ont été réassemblés pour reformer son squelette. Il est exposé dans un nouvel espace prévu à cet effet au Centre d'interprétation des mammifères marins à Tadoussac. Plusieurs os étaient abimés, alors cela a demandé un travail méticuleux pour lui redonner bonne mine.
Rorqual commun
Balaenoptera physalus
Caractéristiques
Rorquals communs de l'est du Canada
Poids
40 à 50 tonnes
Taille
18 à 20 m, jusqu'à 25 m
Longevité
80 à 100 ans
Population
environ 7400 individus
Statut
Préoccupant
Bergeronnes
Poids
inconnu
Taille
16,24 m
Naissance - Décès
possiblement entre 2006 et 2007 - Septembre 2008
Numéro d’identification
non connu des chercheurs
Sexe
Mâle
Après plus de dix ans dans un champ, les os de Bergeronnes ont été réassemblés pour reformer son squelette. Il est exposé dans un nouvel espace prévu à cet effet au Centre d'interprétation des mammifères marins à Tadoussac. Plusieurs os étaient abimés, alors cela a demandé un travail méticuleux pour lui redonner bonne mine.